Analyses critiques
Ce que « vouloir voir ses enfants grandir » veut dire pour les jeunes investis dans le champ politique camerounais autoritaire
Prisca Hélène Assiene Bissossoli
PhD en Science politique
Université de Yaoundé II, Cameroun
Alain-Patrick Loumou Mondoleba
PhD en Science politique
Université de Douala
À partir de la formule devenue célèbre de l’artiste Longué Longué, « je veux voir mes enfants grandir », cet article se propose d’examiner les logiques de conditionnement des acteurs impliqués dans le jeu politique camerounais, afin de mettre en lumière les ressorts du risque perçu face à l’investissement dans le champ politique. Il analyse comment ces dispositions traduisent une intériorisation des menaces associées à l’engagement partisan, révélant des habitus façonnés par une culture de la peur, où le coût de la participation devient un facteur structurant les trajectoires de mobilisation ou de démobilisation, particulièrement chez les jeunes. Saisir la teneur de cette position dans son rapport à la compétition politique constitue une entrée intéressante pour s’inscrire dans la continuité du débat de ce qu’être opposant veut dire pour les jeunes. En analysant ces réalités complexes sous le prisme de la construction sociale du champ politique, l’on souhaite fournir une perspective de lecture relative à la socialisation des jeunes au jeu politique Camerounais. L’article s’ancre méthodologiquement dans un travail de collecte documentaire et d’archives numériques sur les événements susceptibles de renseigner sur la répression politique des opposants, ainsi que sur des témoignages médiatiques. Il se nourrit également des résultats d’entretiens menés entre mars et mai 2024 auprès de jeunes opposants politiques.
Mots-clés
Jeune, répression politique, champ politique, socialisation politique, opposition politique, Cameroun
Plan de l'article
Introduction
Logiques de répression et socialisation politique à la peur
Peurs héritées, peurs transmises
La perception de l’engagement politique des jeunes par leurs familles
Le « Je veux voir mes enfants grandir », ou la précarité juridique du statut du jeune opposant politique
La précarité juridique du statut de jeune opposant politique
Surmonter la peur ?
Le « Je veux voir mes enfants grandir » : un marqueur de désillusion, de détermination et de radicalisation
Désillusion et désengagement politique
Radicalisation et détermination : le surengagement comme effet-retour de la violence politique sur les jeunes
Introduction
Dans le champ politique camerounais, l’usage des phrases telles que « On va faire comment ? », à laquelle s’est jointe la formule : « Je veux voir mes enfants grandir », constitue les éléments du langage populaire courant dans l’espace public. Comprendre cette dernière expression, rendue célèbre le 28 avril 2019 par l’artiste musicien engagé, Longué Longué, demandant pardon à mondovision et faisant aveu de soumission face au politique, a renforcé l’intérêt porté à cette formule qui relève d’un positionnement politique déjà répandu dans l’imaginaire populaire et s’est généralisée dans le discours des acteurs politiques. Le « je veux voir mes enfants grandir » symbolise ici une hésitation, voire une peur de ceux qui, pensant que la situation est mauvaise et injuste, choisissent néanmoins de ne point s’engager concrètement dans la vie politique[1]. Comme la formule précédente : « On va faire comment ? », cette formule camoufle un sentiment d’impuissance chez celui ou celle qui l’emploie. Si Calixthe Beyala y voit une forme de lâcheté, d’égoïsme et de nombrilisme[2] ; pour Valère Bessala[3], cela revient simplement à ne point s’opposer au régime au pouvoir, à se résigner à participer au jeu politique. Dès lors, l’enjeu de cette étude consiste à analyser comment les expériences effroyables vécues par les acteurs engagés politiquement influencent la socialisation politique des jeunes en contexte camerounais autoritaire.
En effet, la formule « voir ses enfants grandir » s’inscrit dans l’héritage des élans autoritaires et des violences du champ politique, ainsi que dans l’usage de la répression (Enoh Meyomesse, 2016) vis-à-vis des acteurs politiquement engagés depuis les années coloniales. Ces élans, déjà perceptibles durant la construction de l’État camerounais avec les luttes d’indépendances nationalistes, ont fortement marqué la mémoire collective. L’assassinat, le 13 septembre 1958, de Ruben Um Nyobe sous une répression brutale dans les forêts de la Sanaga-Maritime[4], fait de lui et de ses œuvres politiques l’objet d’une « immense admiration populaire » (Deltombe, 2008). Pour la seule raison qu’il a dénoncé le sort réservé aux indigènes ainsi que les bassesses et la corruption de ceux qui préféraient faire le jeu de l’adversaire politique plutôt que de s’engager dans la lutte pour la souveraineté nationale et la justice sociale. Plus récemment, le cas de Martinez Zogo, journaliste engagé, enlevé le 17 janvier 2023 et retrouvé mort le 22 janvier de la même année, constitue dans l’imaginaire populaire une illustration frappante de représailles politiques pour avoir trop parlé et dénoncé. Ces évènements ne constituent pas des cas isolés. Ils traduisent comme dans bien d’autres cas de violence observés dans le champ politique, l’inclusion de la force comme levier de structuration de l’ordre politique. Ce jeu de force détermine les réticences des jeunes à s’investir politiquement. Felix Nyeck, membre du bureau politique du Parti camerounais pour la réconciliation nationale (PCRN), corrobore cette hypothèse lorsqu’il soutient que :
C’est vrai que nous n’avons pas des chiffres exacts, mais je puis vous assurer que le nombre de nos adhérents a considérablement baissé après les élections de 2018. Au départ, les jeunes ne connaissaient pas les difficultés qui les attendaient. Dès qu’ils ont été intimidés, ils ont déserté les rangs du parti [5].
La littérature autour du rapport au politique en contexte camerounais, qualifié de « post-autoritaire » (Pommerolle, 2008), « postmonopoliste » (Owona Nguini, 2004 ; Zélao, 2005 ; Owona Nguini & Menthong, 2018), ou « autoritaire » (Mbembe, 2020a), met en lumière l’oscillation entre inclusion et exclusion, méfiance et défiance dans le jeu politique. Ce contexte est fréquemment décrit comme un environnement dans lequel « (…) la politique fait aujourd’hui du meurtre de son ennemi son objectif premier et absolu, sous le couvert de la guerre, de la résistance ou de la lutte contre la terreur » (Mbembe, 2006, p. 26). La libéralisation du champ politique, espérée au lendemain de la tripartite de 1990, n’a malheureusement pas eu lieu. On a plutôt assisté à l’essor d’une démocratisation « passive » (Zelao, 2003) et « autoritaire » (Kamto, 1993) qui ne s’accommode pas du libre « agir politique ». Les violations répétées des droits et libertés et les assassinats divers suscitent des interrogations sur la responsabilité du gouvernement, les arrestations et détentions arbitraires (Amnesty International, 2023-2024), mais aussi le chômage, les scandales de détournements ou encore l’inflation provoquent ainsi « un rapport tendu aux autorités » (Pommerolle, 2008, p. 74). L’identification ou la considération de l’opposant comme un « ennemi » (Mbembe, 2016), un « homme déchet » (Mbembe, 2020b), celui qui doit être puni (Codaccioni, 2013) justifie les violences multiformes que l’on peut lui infliger. En tenant compte de cette réalité, Fabien Eboussi Boulaga (2014, p. 15) reconnaissait déjà que le vocable « opposant » peut être porteur d’une forte charge péjorative et conseillait d’ailleurs qu’« il n’est guère intelligible de se proclamer “opposant” quand, en face de soi, il n’y a pas de proposant ».
La répression longtemps exercée sur ceux qui ont tenté de s’investir avec audace dans l’opposition politique a, selon Marie-Emmanuelle Pommerolle (2008, p. 74), amenuisé les aspirations militantes des générations suivantes. Le désir de s’éterniser fait de l’intimidation, de la censure, de la répression (Ela, 1990) et de « l’assimilation » (Bayart, 1979) les instruments privilégiés de contrôle de l’opposition à l’ordre régnant. Ce dernier « tend à exister en dépossédant les gens d’eux-mêmes ; il trouve sa nature et sa consistance dans le vide qu’il crée autour de lui » (Ela, 1990, p. 58). Dire ou faire de la politique avec un regard critique sur ce que l’ordre politique en place fait expose le sujet à des réalités complexes, surtout lorsqu’il refuse tout marchandage (Sindjoun, 2003), dans un contexte où la loi constitutionnelle ne confère aucun statut à la figure de l’opposant politique (Guimdo Dongmo, 2014). Le mensonge des élites, leurs « promesses moribondes » (Talla, 2014, p. 29), les fraudes électorales (Eboussi Boulaga, 1998, p. 41) contribuent au désenchantement de la politique au Cameroun. L’État a hérité dans ses manières d’administrer la violence et la répression de l’ordre colonial. Ainsi, la socialisation à la violence politique et à la méfiance envers les institutions est profondément enracinée dans l’histoire coloniale et les dynamiques politiques qui ont suivi l’indépendance, caractérisées par l’éclosion des mouvements nationalistes (Deltombe et al., 2011 ; Mbembe, 1996). Cet héritage a façonné les institutions politiques, les comportements des élites et les interactions entre l’État et les citoyens en général, les jeunes en particulier. La violence politique observée dans le champ politique camerounais actuel constitue l’un des piliers sur lesquels l’État camerounais postcolonial s’est construit.
Par ailleurs, il existe une intersection entre la littérature sur le rapport des jeunes à la politique et celle sur la gouvernance du « gouvernement perpétuel » (Owona Nguini & Menthong, 2018). Celle qui met en relief la continuité autoritaire (Kojoué, 2020) qui les renforce à partir des politiques dédiées à la jeunesse, leur exclusion sociale et leur précarisation (Amougou, 2016) comme une condition indétrônable[6]. La crise de la gouvernance publique et des politiques publiques a provoqué chez les jeunes une désaffection à l’égard des institutions et des élites politiques (FES, 2014). Cette désaffection a un impact direct sur leur perception de la politique (Eboussi Boulaga, 2011 ; Loumou Mondoléba, 2020a) et pour laquelle ils éprouvent désormais pour la majorité, un désintérêt. L’étude menée par Fabien Eboussi Boulaga (2011), d’une part, sur les perceptions et les attitudes observées chez les jeunes concernant la politique et, d’autre part, sur leurs dynamiques d’engagement et de désengagement politique fait le constat que bien que les jeunes constituent la majorité démographique (65 %), ceux-ci représentent paradoxalement une minorité politique.
Perçus comme l’avenir et non le présent, les jeunes sont jugés dénués « des qualités de la maturité » (De Bonneval, 2011, p. 18) et donc, des aptitudes nécessaires pour parler de la politique ou faire de la politique. Dans une posture dénigrante, les seniors associent fréquemment la jeunesse à l’irresponsabilité, à l’étourderie, à la folie, etc. (De Bonneval, 2011, p. 18). Pour De Boeck et Honwana (2000), les jeunes en Afrique sont souvent perçus comme étant en marge de la société, économiquement et politiquement. Ils présentent en réalité de multiples facettes. Selon les cas, les jeunes sont perçus tantôt comme des cibles et des victimes, tantôt comme des combattants, des activistes, des entrepreneurs, mais aussi comme des rebelles, des hors-la-loi et des criminels. Leur position et leur rôle dans la société sont donc complexes et ambivalents.
À bien y regarder, la littérature sur le rapport des jeunes à la/au politique se concentre plus sur leur participation et leur représentation politiques que sur leur socialisation politique. La présente étude tente modestement de combler cet écart. Sa problématique est construite autour d’une question principale : comment le désir de « voir ses enfants grandir » se traduit-il dans l’engagement politique des jeunes au Cameroun en contexte autoritaire ? Cette question permet d’explorer plusieurs autres aspects, notamment les réalités que cache ladite formule. Elle met en évidence les dilemmes émotionnels et moraux auxquels sont confrontés ces citoyens, notamment leur responsabilité envers leur famille et leur désir de lutter pour la justice et la démocratie.
En plus d’un travail de collecte documentaires et d’archives numériques sur les événements majeurs susceptibles de renseigner sur la répression politique des opposants et des témoignages médiatiques, ce travail s’appuie sur des entretiens semi-directifs menés auprès de jeunes militants des partis de l’opposition (PCRN, SDF, MRC) sur la quotidienneté de leur engagement politique. Le partage d’expériences au sein de leurs mouvements partisans et la collecte de leurs récits sur la réalité politique ont été privilégiés. Une analyse de leurs récits a permis d’identifier les dynamiques politiques et les risques associés à l’engagement politique.
En analysant ces réalités complexes sous le prisme de la construction sociale du champ politique, cette réflexion souhaite fournir une perspective approfondie sur la socialisation politique des jeunes au Cameroun.[1] La théorie de la construction sociale de la réalité (Berger & Luckmann, 1966) fournit un fondement théorique intéressant, car elle rappelle que le positionnement des jeunes dans leur interaction avec le politique n’est qu’une construction. Les dispositions liées au risque et à la peur de s’engager en politique seraient ainsi intériorisées comme des normes sociales, façonnant leur rapport à l’ordre politique (Konings, 1985) en tant que cadets sociaux.
Logiques de répression et socialisation politique à la peur
Les logiques de répression font référence aux différentes méthodes utilisées par l’ordre gouvernant pour réprimer les dynamiques de résistance ou de subversion politique. Plus précisément, la répression s’entend au sens de McAdam et al. (2001) comme l’ensemble des « efforts pour supprimer tout acte contestataire ou tout groupe ou organisation responsable de ces derniers » (p. 69). En contexte camerounais, elles incluent l’utilisation de la violence policière, des arrestations et emprisonnements arbitraires, de la censure, de la surveillance, de la répression économique, voire de l’assassinat, ainsi que d’autres mesures visant à dissuader, contrôler ou éliminer les individus ou les mouvements perçus comme une menace pour l’ordre établi (DIDR-OFPRA, 2022). La violence politique est comprise ici comme une ressource de pouvoir qui implique la menace ou l’usage effectif de la contrainte physique (Braud, 2002). En tant que ressource, elle peut être mobilisée dans le cadre de revendications ou dans celui du maintien du pouvoir. En effet, les pratiques répressives se caractérisent également par des restrictions des libertés civiles et politiques[7] ainsi que la violation permanente des droits civiques. Au Cameroun, la socialisation des jeunes à la violence et à la peur du champ politique trouve ses racines dans l’histoire et se transmet dans le tissu social à travers des événements historiques identifiables. De la période coloniale à la lutte pour l’indépendance, en passant par les conflits politiques et les défis sécuritaires contemporains, le Cameroun a été le théâtre de violences et de peurs qui ont façonné la perception et les comportements des jeunes.
Peurs héritées, peurs transmises
Plusieurs moments historiques majeurs ont suscité chez les jeunes Camerounais, à différentes époques, la peur de dénoncer, de contester et de manifester. La littérature sur les mouvements estudiantins au Cameroun (voir Fokwang, 2009 ; Konings, 2005, 2009 ; Mokam, 2012 ; Pommerolle, 2007 ; Morillas, 2015, 2018) montre que, par le passé, les jeunes se sont mobilisés à plusieurs reprises pour des causes sociales et politiques. Chronologiquement, les premières mobilisations des jeunes remontent à 1963, lorsqu’une grève des étudiants fut organisée à l’université fédérale du Cameroun. Les étudiants, réunis dans le cadre d’une association dénommée Fédération nationale des étudiants du Cameroun (Fenec), revendiquaient des bourses et un meilleur encadrement académique. En 1969, une autre grève des étudiants fut organisée et subit une répression « rapide et efficace ». Les étudiants grévistes furent renvoyés dans leurs villages (Bayart, 1979). De 1979 à 1981, plusieurs grèves étudiantes mirent en avant des contestations de nature économique et sociale plutôt que politique. Les étudiants de l’université de Yaoundé réclamèrent l’attribution de bourses à tous les étudiants et une augmentation au même titre que les salaires. Ils exigèrent également une amélioration des repas servis dans les restaurants universitaires, la prise en charge par l’État des loyers des étudiants résidant dans les mini-cités universitaires, ainsi qu’une réduction des loyers en résidences universitaires. Malgré le caractère purement corporatiste de leurs revendications, ces grèves ont été violemment réprimées par les forces de maintien de l’ordre (Morillas, 2018).
Le 18 décembre 1986, une autre mobilisation majeure des étudiants eut lieu à l’université et hors de l’université. Plus de 300 étudiants furent arrêtés (Amnesty International, 1987). Parmi eux, certains leaders étudiants furent exclus de l’université. En mai 1991, le Parlement estudiantin, également connu sous le nom de « Parlement », est associé à la Coordination nationale des partis politiques et des associations. Cette dernière va initier l’opération « villes mortes » dans plusieurs localités du pays en avril 1991. La répression politique à laquelle les manifestants ont fait face les a amenés à repenser leur mode d’action, l’option des « villes mortes » apparut comme une stratégie pouvant désamorcer les violences policières et minimiser les risques physiques.
Le « Parlement », dirigé par trois étudiants de l’université de Yaoundé (Corantin Talla surnommé Général Schwarzkopf, Waffo Wanto Robert alias Colin Powell et Yimga Yotchou Blaise alias Abou Nidal), va engager une manifestation contre la détérioration des conditions d’études due à la crise économique et aux mesures d’ajustement structurel, ainsi que l’annulation des élections étudiantes (Morillas, 2018). Le Parlement organisa des manifestations et boycotta les cours pour réclamer un véritable multipartisme et s’opposer à la réforme universitaire de 1993, qui supprima les bourses et augmenta les frais universitaires. Le mouvement reprit, entre avril et juin 1996, pour protester contre les frais universitaires et les charges supplémentaires. D’après les estimations, une centaine d'étudiants moururent lors de ces grèves étudiantes (Eteki-Otabela, 2001, p. 375), même si le ministre de la Communication de l’époque, Augustin Kontchou Kouomegni, affirma qu’il y eut « zéro mort ».
Les étudiants impliqués de près ou de loin dans les différentes grèves furent accusés d’avoir commis des infractions liées au non-respect des autorités universitaires et d’avoir participé directement ou indirectement à des activités subversives. Les sanctions prévues par les textes en vigueur, tant sous le régime du parti unique que sous le régime multipartite, étaient similaires. Il s’agit entre autres d’avertissement, de blâme, d’interdiction de se présenter aux examens, d’exclusion temporaire d’un ou deux ans, ou encore d’exclusion définitive des établissements universitaires nationaux. Beaucoup de jeunes d’aujourd’hui ont vécu ces moments effroyables, ponctués d’assassinats publics, certains y ont perdu leurs parents. Ils en sont sortis, pour la plupart, traumatisés (Ouambo Ouambo, 2020).
Trois autres séquences ont contribué à susciter chez les jeunes Camerounais la peur de s’engager dans la politique. Premièrement, les « émeutes de la faim » de 2008, au cours desquelles de nombreux jeunes ont perdu la vie, noyés dans le Wouri ou tués par balles. Étiquetés comme étant « des apprentis sorciers » par le président Paul Biya, la répression des manifestants ne fera l’objet d’aucune retenue. Plus de 1 500 jeunes seront arrêtés et emprisonnés pour vandalisme, vols et troubles à l’ordre public (Sourna Loumtouang, 2015).
Deuxièmement, la crise postélectorale de 2018 s’est caractérisée par une forte répression des manifestants pro-MRC qui prenaient part aux « marches blanches » organisées par le parti. Plusieurs militants furent blessés au cours de ces marches (Jeune Afrique, 2019), plus d’une centaine furent interpellés et « détenus arbitrairement, simplement pour avoir exercé leurs droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique » (Amnesty International, 2019). Les motifs de leur détention variant entre « insurrection », « rébellion », « complicité de sécession » et « atteinte à la sûreté de l’État » (Amnesty International, 2019).
Troisièmement, il y a eu l’assassinat du journaliste Martinez Zogo, qui venait de dénoncer un fait de corruption et d’affairisme le 22 décembre 2022. Dans le cadre de son émission Embouteillage, Martinez Zogo avait l’habitude de dénoncer les actes de corruption et les tares de la société. Il fut enlevé le 17 janvier dans la banlieue de la capitale, devant un poste de gendarmerie, puis, retrouvé mort cinq jours plus tard. Son corps était en état de putréfaction et portait des traces de supplices. L’annonce publique de cette information a suscité une indignation nationale et internationale dénonçant la décomposition du régime en place (Le Monde Afrique, 2023). « C’est le règne de la terreur. On a l’impression que si un journaliste parle, il va mourir », déclara Prince Nguimbous (Le Monde Afrique, 2023). Ce qui fut ensuite appelé « l’affaire Martinez Zogo » va renforcer les représentations du pouvoir politique comme un « serpent affamé » (Alexandre, 2021), le « Moulinex prêt à malaxer les condiments[8] », ou encore à un « essaim d’abeilles » (Atanga Nji, 2020).
En effet, cette représentation qui réitère le discours du ministre de l’Administration territoriale, renseigne sur la nature du rapport de l’État à toutes dynamiques contraires, considérées comme subversives et identifiées ici à celles des « vendeurs d’œufs » (Alexandre, 2025). La politique est de ce fait, l’affaire des hommes corrompus, mafieux et qui ont « trempé[9] » dans « les mauvaises choses[10] ». Pour les jeunes témoins de ces réalités, la répression et la restriction de la liberté d’expression normalisent la peur et limitent la possibilité d’exprimer des opinions divergentes. De plus, ils redoutent les conséquences sociales de leur engagement politique, car souvent désapprouvé par les familles. La politique est généralement perçue comme dangereuse. L’opprobre encouru en s’engageant dans les rangs de l’opposition ne se limite pas simplement à l’individu, à sa seule personne ; il rejaillit sur sa famille, sa communauté. Face à cette peur généralisée qui caractérise la majorité des jeunes[11], Mebene, jeune militant du MRC, s’interroge : « Peut-on dire que nos enfants grandiront bien dans cet environnement où règnent la corruption, le népotisme et l’arbitraire ? Grandiront-ils bien s’ils risquent de se faire agresser et mourir bêtement à l’hôpital faute de 5 000 FCFA ? ». Pour lui, l’on ne saurait répondre par l’affirmative. L’engagement politique des jeunes et leur abnégation face aux défis constituent une condition indispensable pour espérer voir leurs enfants grandir demain.
La perception de l’engagement politique des jeunes par leurs familles
Les dilemmes émotionnels et moraux auxquels les jeunes engagés en politique sont confrontés commencent très souvent au sein de la famille[12]. En effet, lorsque les jeunes s’engagent en politique, les membres de leur famille sont les premières personnes qui leur rappellent la dangerosité du champ politique. L’engagement politique d’un jeune met aussi en danger son entourage (ami·e·s, famille). Par conséquent, il est fréquent qu’elles expriment leur désaccord avec l’engagement politique de leurs enfants, par souci de les protéger et de se protéger elles-mêmes. Il arrive que les membres de ces familles soient soumis à des jugements et aux regards désapprobateurs de la part de leurs employeurs et de leurs communautés[13]. Corinne Atima, diplômée de l’Institut des relations internationales du Cameroun (Iric) et jeune militante du MRC, raconte :
Au départ, mon engagement était perçu comme un gros risque que je prenais. Ce n’était en tout cas pas la chose à faire. Tout mon entourage avait peur… peur que je sois menacée, violentée, emprisonnée et, au pire des cas, tuée. D’autant plus que même mystiquement, dans notre univers politique, les cas de décès sont légion dans ma localité [Yokadouma] [14].
D’autre part, une autre difficulté à laquelle les jeunes sont fréquemment confrontés lorsqu’ils s’engagent dans les rangs de l’opposition est le clivage idéologique entre eux et les membres de leur famille qui, eux, sont des « soutiens traditionnels » du parti au pouvoir. Ces discordances idéologiques et les perceptions variées de la/ou du politique entraînent des désaccords profonds et des tensions familiales, qui donnent lieu à des situations d’isolement, voire de rejet[15]. Elles peuvent également provoquer des ruptures et des divisions, mettant à l’épreuve les liens familiaux. C’est le cas du jeune militant du MRC, Jean-Paul Mouaffi, qui relate :
Je fais partie de cette catégorie des jeunes qui ont longtemps milité pour le RDPC (…). Dès les départs de mon engagement, ma famille a pris peur ; ce n’est pas évident de militer dans les rangs de l’opposition au Cameroun. Je suis dans une famille où plusieurs personnes sont du RDPC. Les premières personnes à m’intimider étaient les membres de ma famille, mais dès que j’ai été interpellé et incarcéré, le militantisme pour le RDPC a pris un très grand coup dans ma famille. J’ai interdit aux membres de ma famille qui étaient du RDPC de venir me rendre visite en prison. J’ai même demandé à mon propre père qui était président de sous-section du RDPC de ne pas m’adresser une lettre s’il n’avait pas démissionné du RDPC[16].
Par méfiance, certaines familles excluent ou ostracisent les jeunes opposants politiques de certains événements familiaux, de peur qu’ils soient interprétés par le pouvoir en place comme des réunions politiques de l’opposition. Toutefois, la persévérance des jeunes dans leur engagement, associée à la détérioration de la gouvernance publique au Cameroun, finit par amener les familles à accepter leurs choix politiques et à les soutenir dans leur lutte, comme l’atteste ce témoignage de Corinne Atima :
Mais peu à peu, au regard de l’assurance que je leur apporte de ma ténacité, ma motivation et de mes résultats progressifs, chacun m’apporte son soutien. Très peu restent sceptiques. Plusieurs m’encouragent à aller de l’avant et me croient désormais capable de plus grand[17].
Dans le même sens, Jean-Paul Mouaffi relate :
Je crois qu’aujourd’hui, compte tenu de la dégradation progressive de tous les pans de notre société, nous ne faisons plus trop d’efforts pour que les gens, même au sein de ma famille, comprennent que le combat que nous menons est un combat noble. Il y a même comme un effet de contagion dans ma famille ; mon militantisme inspire mes proches[18].
Le « Je veux voir mes enfants grandir », ou la précarité juridique du statut du jeune opposant politique
« Je veux voir mes enfants grandir » révèle les défis et les risques concrets auxquels les jeunes investis dans le champ politique camerounais sont confrontés au quotidien, surtout lorsqu’ils choisissent de militer dans les rangs de l’opposition. Cette vulnérabilité est tout d’abord liée à la précarité du statut juridique de l’opposition au Cameroun (Guimdo Dongmo, 2014).
La précarité juridique du statut de jeune opposant politique
Au Cameroun, l’absence d’un statut juridique conféré à l’opposition politique fait de la figure de l’opposant une figure vulnérable. Si dans les démocraties occidentales, critiquer, dénoncer et contester constituent l’essence même de l’opposition politique (Gicquel, 1993), dans d’autres contextes, comme c’est relativement le cas au Cameroun, « on trouve des systèmes politiques dans lesquels le pouvoir s’efforce de comprimer la contestation et, à la limite, de l’annihiler » (Gicquel, 1993, p. 23). Une consécration textuelle du statut d’opposition constituerait une acceptation de la parole contraire, de la dénonciation et de la contestation politique, piliers des sociétés libérales (Donfack Sokeng, 2003). Conférer un statut juridique à l’opposition politique passe nécessairement par au moins deux choses : d’une part, l’institutionnalisation des organismes reconnus pour parler et agir au nom de l’opposition et, d’autre part, l’instauration d’un cadre juridique et politique qui promeut la libre expression de l’opposant et le protège. Au Cameroun, « bien que les règles constitutionnelles contiennent des conditions d’émergence d’un statut de l’opposition politique, elles ne consacrent ni ne prévoient la reconnaissance d’un tel statut » (Guimdo Dongmo, 2014, p. 87).
La précarité de ce statut juridique expose les jeunes engagés dans les rangs de l’opposition à des violences politiques multiformes. Dans ce contexte, il est important de souligner que les défis auxquels ils sont confrontés ne se limitent pas seulement à ceux qui militent dans les rangs de l’opposition. Même parmi ceux qui soutiennent le parti au pouvoir, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), les jeunes sont confrontés à des difficultés particulières. En effet, au sein du RDPC, on observe une socialisation autoritaire qui prévaut. Les jeunes membres du parti font face à la pression des aînés, qui leur demandent constamment d'attendre leur tour sans faire preuve d'agitation, en utilisant fréquemment une formule couramment répandue : « Attends Ton Tour » (ATT). Cette expression symbolise une attitude de domination et de contrôle exercée par les aînés sur les jeunes membres du parti, les reléguant à un rôle subalterne et les empêchant de prendre une part active aux décisions politiques. Cette manière de fonctionner limite à coup sûr la participation des jeunes, en les maintenant dans une position d’attente perpétuelle, où leurs aspirations et leurs idées sont systématiquement reléguées au second plan. Cela engendre chez certains jeunes militants du RDPC un sentiment de frustration et de marginalisation, car ils se sentent exclus du processus décisionnel et voient leurs perspectives et leurs voix étouffées. De plus, cette socialisation autoritaire renforce les structures de pouvoir existantes au sein du parti, perpétuant ainsi un système hiérarchique où les aînés détiennent le contrôle absolu. Cela entraîne un manque de renouvellement générationnel et d’idées novatrices, et une stagnation politique.
Surmonter la peur ?
Malgré les risques considérables auxquels ils sont confrontés, certains jeunes parviennent à surmonter la peur des représailles et à militer activement dans les rangs de l’opposition. Motivés par « la force des convictions, la conscience de la nécessité de s’engager pour une transformation d’une société qui va au-delà [des intérêts égoïstes][19] », ils sont engagés dans les luttes pour la justice et la démocratie. Conscients des dangers multiples auxquels ils s’exposent, certains jeunes nous ont rapporté que le simple fait de s’engager constitue déjà un acte de bravoure, une première manière de surmonter la peur.
Une autre stratégie utilisée par les jeunes opposants pour surmonter la peur est la formation de réseaux de soutien et de solidarité. Ces réseaux offrent un espace de partage d’expériences, de craintes et d’espoirs avec d'autres personnes ayant les mêmes idéaux. Ils créent un environnement de soutien émotionnel et de renforcement mutuel, leur permettant de puiser dans la force collective pour faire face à l’adversité. Cependant, le constat que l’on peut établir en discutant avec ces jeunes engagés en politique, c’est que la peur n’est jamais totalement surmontée. Elle reste une réalité constante.
Le « Je veux voir mes enfants grandir » : un marqueur de désillusion, de détermination et de radicalisation
Les violences politiques infligées aux jeunes qui tentent de s’impliquer activement en politique peuvent engendrer, chez certains, un sentiment de désillusion les poussant à se désengager, tout en suscitant chez d’autres la détermination et la radicalisation. « Je veux voir mes enfants grandir » exprime une profonde préoccupation pour l’avenir, mais il révèle également les effets de l’oppression politique sur la perception et les actions des acteurs politiques. Lorsque les jeunes croupissent dans le chômage, la pauvreté, se sentent impuissants et frustrés face à l’oppression politique, certains peuvent être poussés à adopter des positions extrêmes pour lutter contre le système en place (Loumou Mondoléba, 2020b). La radicalisation peut prendre différentes formes, allant de la participation à des manifestations et à des mouvements de protestation violents, à l’adhésion à des idéologies extrémistes ou à des actes de violence politique (PNUD, 2017).
Désillusion et désengagement politique
« Le militantisme de l’opposition s’apparente à une défiance vis-à-vis du système politique établi[20]. » Raison pour laquelle, les jeunes qui y sont associés sont perçus comme des fauteurs de troubles et des subversifs de l’ordre établi. Cette perception du militantisme des jeunes semble partagée. Au cours de notre entretien avec Félix Nyeck, il nous confie que, face à la brutalité et à la violence vécue dans le champ politique, beaucoup de jeunes militants du parti PCRN ont remis en question leur engagement politique, soit après intimidation, soit après renonciation pour rejoindre les rangs du parti au pouvoir. « Très peu de jeunes militants et sympathisants, pourtant très engagés en 2019 dans le cadre du Mouvement 11 millions de citoyens, osent aujourd’hui se revendiquer, encore moins s’afficher ou être associés aux activités du parti depuis les dernières échéances électorales[21]. »
Ce désengagement procède du constat selon lequel, de la période autoritaire à la période dite post-autoritaire, les ressources pourvues par l’opposition pour faire face à la répression de l’ordre politique dominant demeurent inchangées. L’opposition constitue toujours la catégorie dominée, dont les recours pour réparation en cas de violation des droits demeurent inaudibles. De fait, après les manifestations réprimées de 2019 et de 2020, le rapport de Human Rights Watch (2021) fait état d’environ 124 prisonniers politiques.
C’est cette réponse intransigeante par la violence aux manifestations pacifiques de l’opposition, et ce malgré les dénonciations faites par Humans Rights Watch, qui explique en partie cette désillusion et ce désengagement de la plupart des jeunes. Cette désillusion résulte de l’impuissance des jeunes en politique et de l’intériorisation de la répression. Militer au sein de l’opposition, c’est s’exposer à une violence du champ politique, empêchant ainsi de voir ses enfants grandir. Cet aveu d’impuissance ne remet pas en question l’échec politique ou la mauvaise gouvernance qui prévaut, mais illustre que, par peur de représailles, beaucoup optent pour une résignation à leurs engagements politiques. Cette formule utilisée dans le champ sociopolitique est donc « la consécration de l’ensauvagement de la scène politique camerounaise où militer contre le régime est synonyme de défiance politique[22] ». De même, pour Célin Wappi[23], « vouloir voir ses enfants grandir » est une formule utilisée de manière ironique qui consiste à choisir le silence par peur de représailles, plutôt que de risquer sa vie et celle de ses proches pour une cause politique juste ou une dénonciation publique à l’endroit du pouvoir[24].
En effet, la démocratie en contexte post-autoritaire comme le rappelait déjà Rousseau est convenable aux dieux. Cette aporie est renforcée lorsqu’on interroge les « on va faire comment ? » qui rappellent déjà la désolation des jeunes dans un contexte où faire de la politique est avant tout un danger et que la survie relève en partie des actes de soumission et d’obéissance vis-à-vis du pouvoir dominant. Ces actes sont d’abord cognitifs et participent à la fabrication de la mémoire collective qui œuvre à l’essor des catégories de perception ayant pour finalité, la désacralisation de l’« esprit d’État » dans son rôle d’encadrement de la compétition dans le champ politique. Dès lors, faire la politique revient aussi à se priver de rendre compte de la réalité politique telle qu’elle est perçue, mais plutôt comme on voudrait qu’elle soit. Pour les jeunes, cela constitue avant tout un mode de survie. Rendre donc compte de ces silences dans le champ politique, à partir du niveau d’investissement des jeunes dans l’imaginaire social, marque le processus de transformation de la société elle-même. Favoriser une analyse compréhensive des événements qui marquent le déroulement des transitions régressives permet de rendre progressivement compte de l’émergence d’un malaise symptomatique autoritaire, qui s’adapte et se révèle à la société par des formules comme celles mises en exergue ici.
Radicalisation et détermination : le surengagement comme effet-retour de la violence politique sur les jeunes
La violence politique produit des effets contradictoires sur les jeunes engagés. Si, d’une part, elle engendre un sentiment de peur et d’incertitude quant à leur sécurité et à celle de leur famille ; d’autre part, elle renforce parfois leur détermination à s’opposer au régime oppressif et à lutter pour la justice et la démocratie. Parler de l’engagement politique des jeunes, c’est avant tout rendre compte des nouvelles formes d’expression politique (Assiéne Bissossoli & Salla Bezanga, 2023), des comportements et dispositions (in)formelles (Fillieule et al., 2017) qu’ils mobilisent et qui traduisent cette radicalisation. Ce surengagement sur fond de radicalisation peut aller jusqu’à la menace de se donner la mort pour ses convictions et de se constituer en martyrs pour entrer dans les rangs des figures marquantes de la lutte pour l’indépendance et la libération politique du Cameroun. Le caractère radical de ce positionnement tient aussi au fait que le souci de soi et l’estime de soi nourrissent de l’engagement pour autrui et les tiers (Machikou, 2024). La lettre écrite le 9 mai 2019 par Jean-Paul Mouaffi et publiée le 10 mai de la même année illustre bien les formes que peut prendre la radicalisation dans le champ politique. Détenu à la prison centrale de Yaoundé à cette période, pour se faire entendre, il promet de se suicider à l’occasion de la fête de l’unité nationale du 20 mai 2019. Des extraits de sa lettre témoignent bien de ce surengagement :
« Malgré ma séquestration politique, les tortures quotidiennes et les menaces permanentes qu’inflige le régime de monsieur Biya, je me sens plus libre aujourd’hui au sein du MRC. »
« Au même titre que les autres combattants pris en otages et gardés avec moi ici à la prison centrale de Yaoundé, je ne suis : ni terroriste, ni hostile à la patrie, ni destructeur de biens publics, ni rebelle… »
« Si le régime de Biya persiste dans sa logique de sauvagerie politique et son indifférence face à la dégradation sociale qu’il a créée et entretient, je me donne la mort le 20 mai 2019 au nom de la libération du peuple camerounais. »
« Rien ne m’empêchera de me donner en sacrifice suprême ce jour, si rien n’est fait dans le sens de l’amélioration du climat sociopolitique au Cameroun. Même ligoté, je réussirai à traverser pour l’au-delà, rester aux côtés des Um Nyobe, Ouandjie et les autres[25]. »
Le traitement des acteurs politiques de l’opposition constitue les premiers marqueurs des actes de rupture avec l’ordre politique. L’imposition de l’autorité politique en contexte post-autoritaire passe par plusieurs mécanismes selon les expériences et le niveau de responsabilisation chez les jeunes de l’opposition. Le tribut de ce militantisme pour les jeunes de l’opposition se décline à travers les arrestations, les menaces d’exécution, l’emprisonnement sur caution de charges judiciaires et pénales lourdes, voire la mort. Le discours de Félix Nyeck s’inscrit dans la même dynamique que celui de Jean-Paul Mouaffi. Lorsqu’il fait état de :
Je rappelle à mon épouse tous les jours que je peux sortir un matin de chez moi et ne jamais rentrer à cause de mes positions politiques. Moi, je marche avec mon cercueil sur la tête parce que je suis prêt à mourir pour mes convictions et mon engagement politique ; ma femme le sait[26].
Les jeunes dans le champ politique sont, au regard de cet exposé, le fruit d’un apprentissage et d’une expérience vécue de leur rapport au politique au sein des partis d’opposition, mais aussi sur la scène politique. S’ils se réapproprient les valeurs, les normes de fonctionnement et les schèmes de pensées des partis pour lesquels ils militent, cette transmission se traduit à travers les discours de dénonciation qu’ils mobilisent sur la scène publique et médiatique. Il y a donc une réelle socialisation qui se lit dans les prises de parole des jeunes politiciens de « carrière » (Combes & Fillieule, 2011). Ces facteurs permettent d’envisager le militantisme comme une ressource de positionnement et de classification des oppositions dans le champ politique. À partir de la réappropriation et de l’usage qui est fait de cette formule, on peut mesurer le niveau d’engagement politique des acteurs à défendre leurs positions. C’est donc un levier discursif intéressant qui sert aussi bien l’opposition que l’ordre dominant. Il ouvre la possibilité d’agencer analytiquement les raisons d’agir des jeunes, donnant ainsi matière à forger leur détermination et à faire preuve d’ingéniosité politique pour se faire entendre quant à la cause défendue pour le changement. Cela est tributaire de leur socialisation au rapport difficile avec le pouvoir. Tout comme pour le parti dominant, « vouloir voir ses enfants grandir » peut constituer un levier de mesure de soumission des adversaires politiques à la volonté de l’ordre dominant qu’il incarne.
En effet, l’engagement des jeunes dans le champ politique dépend des motivations qui les accompagnent. La carrière des jeunes en politique est révélatrice des adaptations, des reconfigurations des agents dans leur rapport à l’engagement. Elle permet de renseigner sur les logiques d’action à partir desquelles les jeunes inscrivent leurs projets à un moment donné et du degré d’adhésion aux principes qui les gouvernent. L’action politique questionne la prise de conscience de leur propre trajectoire de participation et les rétributions symboliques (Fillieule et al., 2017). L’analyse de la participation des jeunes permet de saisir la signification qu’ils accordent à leur engagement sur le terrain et l’effet des barrières institutionnelles sur leurs motivations.
Notes
[1] Entretien avec Célin Kamche Wappi, docteur en science politique, jeune militant du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) « dès les premières heures de sa naissance » (dixit), secrétaire général adjoint des jeunes, 30 avril 2024, à Baganté.
[2] https://web.facebook.com/100087601764175/posts/je-veux-voir-mes-enfants-grandir-ou-du-nombrilisme-super-mis%25C3%25A9rable-%25C3%25A0-la-cameroun/165784486351609/?_rdc=1&_rdr, consulté le 13 juin 2024.
[3] Valère Bessala est le « Guide » du parti Jouvence.
[4] Robert Um Nyobe était un homme politique camerounais et une figure majeure du mouvement indépendantiste au Cameroun. Né le 13 septembre 1913 à Sangmélima, au sud du Cameroun, il est considéré comme le fondateur et le leader du mouvement nationaliste camerounais, l’Union des populations du Cameroun (UPC). En 1948, il a cofondé l’UPC, un parti politique qui visait à lutter pour l’indépendance du Cameroun et à promouvoir les droits et les intérêts des Camerounais. Durant ses premières années, l’UPC, dirigée par Um Nyobe, a adopté des méthodes de lutte non violentes, organisant des manifestations, des grèves et des campagnes de sensibilisation pour mobiliser la population camerounaise contre le colonialisme français. Cependant, la répression brutale exercée par les autorités coloniales a conduit à une radicalisation progressive du mouvement. Son discours nationaliste et ses efforts pour unir les différentes ethnies et régions du Cameroun ont fait de lui une figure charismatique et respectée. Le 13 septembre 1958, Robert Um Nyobe a été tué lors d’une opération militaire menée par l’armée française. Sa mort a été un coup dur pour le mouvement indépendantiste camerounais, mais son héritage en tant que leader visionnaire et défenseur des droits du peuple camerounais demeure intact.
[5] Entretien avec Félix Nyeck, membre du bureau politique du PCRN, Soa, le 1er mai 2024.
[6] Ces paroles extraites d’un des morceaux du célèbre rappeur engagé camerounais, Général Valsero, en sont d’ailleurs une illustration : « Ce pays tue les jeunes ! Les vieux ne lâchent pas prise. Cinquante ans de pouvoir, après ça, ils ne lâchent pas prise. Le bled dénature. La jeunesse crève à petit feu tandis que les vieux, derrière leurs forteresses, se saoulent à l’eau-de-feu ». Disponible sur : https://www.youtube.com/watch?v=QnUfznDIIkA
[7] Concrètement, cela se traduit par la limitation des libertés (liberté d’expression, liberté de manifester, liberté d’association), ainsi que par des contrôles stricts sur les médias et les activités politiques.
[8] Le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji, qualifiait de « condiments » certains conducteurs de moto taxis, responsables d’agressions, viols, accidents et détournements d’itinéraires à Yaoundé. Les extraits de son discours peuvent être consultés sur ce lien : Actu Cameroun, « Paul Atanga Nji : « le maintien de l’ordre, c’est le moulinex et les malfaiteurs sont des condiments », 2023, https://actucameroun.com/2023/09/27/paul-atanga-nji-le-maintien-de-lordre-cest-le-moulinex-et-les-malfaiteurs-sont-des-condiments/
[9] Entretien avec Amélie Mouandjo, jeune étudiante à l’université de Douala, le 2 juin 2024, à Douala.
[10] Il s’agit ici des pratiques magico-religieuses, sectaires et mystiques.
[11] Dans le cadre d’une étude récemment menée sur la participation politique des jeunes au Cameroun, nous avons recensé 94 jeunes sur les 100 avec lesquels nous avons fait un groupe de discussion, qui nous ont indiqué ne pas être prêts à dénoncer les tares observées dans la société de peur de subir des représailles.
[12] Entretiens avec Célin Kamche Wappi, 30 avril 2024, à Baganté ; Félix Nyeck, 1er mai 2024, à Soa ; Ismael Mbock, jeune sympathisant de l’UPC, 12 mai 2024, à Yaoundé.
[13] Entretien avec Célin Kamche Wappi , 30 avril 2024, à Baganté.
[14] Entretien avec Corinne Atima, diplômée de l’Iric et jeune militante du MRC, 10 mai 2024, à Douala.
[15] Entretiens avec Félix Nyeck, 1er mai 2024, à Soa ; Ismael Mbock, 12 mai 2024.
[16] Entretien téléphonique avec Jean-Paul Mouaffi, jeune militant du MRC, 27 juin 2024.
[17] Entretien avec Corinne Atima, jeune militante du MRC, 12 avril 2024, à Douala.
[18] Entretien téléphonique avec Jean-Paul Mouaffi, 27 juin 2024.
[19] Entretien avec Célin Kamche Wappi, 30 avril 2024, à Baganté.
[20] Entretien téléphonique avec Jean-Paul Mouaffi, 27 juin 2024.
[21] Entretien avec Félix Nyeck, 1er mai 2024, à Soa.
[22] Entretien téléphonique avec Jean-Paul Mouaffi, 27 juin 2024.
[23] Un jeune militant du parti d’opposition MRC.
[24] Entretien avec Célin Kamche Wappi, 30 avril 2024, à Baganté.
[25] Tiré de la lettre de Mouaffi Djeukou Jean Paul, publié le 12 mai 2019 par Cameroon-info.net, www. Cameroon-info.net
[26] Entretien avec Félix Nyeck, 1er mai 2024, à Soa.
Bibliographie
Alexandre, L. (2021). Atanga Nji à propos des auteurs de violences contre les agents de police : « Un serpent affamé viendra vous chercher dans votre cachette », Actu Cameroun. https://actucameroun.com/2021/09/12/atanga-nji-a-propos-des-auteurs-de-violencescontre-les-agents-de-police-un-serpent-affame-viendra-vous-chercher-dans-votre-cachette/
Alexandre, L. (2025). Paul Atanga Nji aux promoteurs des médias : « Celui qui vend des oeufs ne cherche pas la bagarre », Actu Cameroun. https://actucameroun.com/2025/07/17/paul-atanga-nji-aux-promoteurs-des-medias-celui-qui-vend-des-oeufs-de-cherche-pas-la-bagarre/
Amnesty International. (2019). Libérez les personnes détenues pour avoir exprimé leurs opinions au Cameroun. https://www.amnesty.org/fr/petition/liberez-les-personnes-detenues-pour-avoir-exprime-leurs-opinions-au-cameroun/ (consulté le 15 juin 2024)
Amnesty International. (2023/2024). Cameroun 2023. Rapport sur la situation des droits de l’homme au Cameroun. Amnesty International. https://www.amnesty.org/fr/location/africa/west-and-central-africa/cameroon/report-cameroon/
Amougou, G. (2016). Jeunesse entreprenante et processus d’auto-prise en charge au Cameroun. Revue Jeunes et Société, 1(2), 79-97.
Assiene Bissossoli, P. H., & Salla Bezanga, E. V. (2023). Rumeurs sur la mort du président Paul Biya et usages politiques des réseaux sociaux. Communication, technologies et développement, 202. https://doi.org/10.4000/ctd.8943
Atanga Nji, P. (2020). Conférence de presse le 24 août. Yaoundé.
Bayart, J.-F. (1979). L’État au Cameroun. Presses de la Fondation nationale des sciences politiques.
Berger, P., & Luckmann, T. (1966). La construction sociale de la réalité. Méridiens Klincksieck.
Codaccioni, V. (2013). Punir les opposants. PCF et procès politiques (1947-1962). CNRS Éditions.
Combes, H., & Fillieule, O. (2011). De la répression considérée dans ses rapports à l’activité protestataire : modèles structuraux et interactions stratégiques. Revue française de science politique, 61(6), 1047-1072.
De Boeck, F., & Honwana, A. (2000). Faire et défaire la société : enfants, jeunes et politique en Afrique. Politique africaine, 80(4), 5-11.
De Bonneval, E. (2011). Contribution à une sociologie politique de la jeunesse : jeunes, ordre politique et contestation au Burkina Faso [Thèse de doctorat, université Montesquieu – Bordeaux IV / Sciences Po Bordeaux].
Deltombe, T. (2008, 13 septembre). Cameroun, il y a cinquante ans, l’assassinat de Ruben Um Nyobe. Le Monde diplomatique.
Deltombe, T., Domergue, M., & Tatsitsa, J. (2011). Kamerun ! Une guerre cachée aux origines de la Françafrique (1948-1971). La Découverte.
Donfack Sokeng, L. (2003), L’institutionnalisation de l’opposition : une réalité objective en quête de consistance, Dans L. Sindjoun et al. (dir.), Comment peut-on être opposant au Cameroun ? : Politique parlementaire et politique autoritaire. Codesria Books Publication System.
Eboussi Boulaga, F. (1998). Lignes de résistance. Clé.
Eboussi Boulaga, F. (2011). Les jeunes et la politique au Cameroun : Quelles perceptions pour quelle participation ? Friedrich Ebert Stiftung.
Eboussi Boulaga, F. (2014). L’opposition, immobile à grand pas ? Dans F. Eboussi Boulaga et al. (dir.), Repenser et reconstruire l’opposition camerounaise : Questions sur la quête de sens et la subjectivation politique (pp. 11-26). Terroirs.
Ela, J.-M. (1990). Quand l’État pénètre en brousse : les ripostes paysannes à la crise. Karthala.
Enoh Meyomesse. (2016). L’État et la répression de la démocratie au Cameroun. CreateSpace Independent Publishing Platform.
Eteki-Otabela. (2001). Le totalitarisme des États africains : le cas du Cameroun. L’Harmattan.
Fillieule, O. et Al. (2017). Sociologie plurielle des comportements politiques. Presses de Sciences Po, 398 p.
Fokwang, J. (2009). Student activism, violence and the politics of higher education in Cameroon: A case study of the University of Buea (1993-2003). Dans Youth and higher education in Africa: The cases of Cameroon, South Africa, Eritrea, and Zimbabwe (pp. 9-33). Codesria.
Friedrich Ebert Stiftung. (2014). Les jeunes et l’engagement politique.
Gicquel, J. (1993). Droit constitutionnel et institutions politiques (12e éd.). Montchrestien.
Guimdo Dongmo, B-R. (2014). Fondements constitutionnels et statut juridique de l’opposition politique. Dans F. Eboussi Boulaga et al. (Dir.). Repenser et reconstruire l’opposition camerounaise. Questions sur la quête de sens et la subjectivation politique (pp. 85-100). Terroirs.
Human Rights Watch. (2021, 22 septembre). Cameroun : un an après la répression de manifestations, l’intransigeance continue. Les autorités devraient libérer les prisonniers politiques et respecter le droit de réunion pacifique, https://www.hrw.org/fr/news/2021/09/22/cameroun-un-apres-la-repression-de-manifestations-lintransigeance-continue
Jeune Afrique. (2019, 2 juin). Cameroun : Plusieurs militants du MRC blessés au cours d’une marche à Douala. https://www.jeuneafrique.com/716261/politique/cameroun-plusieurs-militants-du-mrc-blesses-au-cours-dune-marche-a-douala/ (consulté le 15 juin 2024)
Kamto, M. (1993). Quelques réflexions sur la transition vers le pluralisme politique au Cameroun. Dans G. Conac (dir.), L’Afrique en transition vers le pluralisme politique (pp. 209-236). Economica.
Kojoué, L. (2020). La continuité autoritaire. L’action publique contre le sida comme révélateur des (non)transformations de l’État au Cameroun. Revue internationale de politiques de développement, 12(1). DOI: https://doi.org/10.4000/poldev.3276
Konings, P. (1985). Les jeunes et l’ordre politique en Afrique noire. L’Harmattan.
Konings, P. (2005). Anglophone university students and Anglophone nationalist struggles in Cameroon. Dans G. J. Abbink & I. van Kessel (dir.), Vanguard or vandals : Youth, politics and conflict in Africa (pp. 161-188). Brill.
Konings, P. (2009). University crisis and student strikes in Africa: The case of the University of Buea (Cameroon). Journal of Higher Education in Africa, 7(1-2), 213-235.
Le Monde Afrique. (2023, 24 janvier). Cameroun : après l’assassinat du journaliste Martinez Zogo, colère et peur chez ses pairs. https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/01/24/cameroun-apres-l-assassinat-du-journaliste-martinez-zogo-colere-et-peur-chez-ses-pairs_6159081_3212.html (consulté le 13 juin 2023)
Loumou Mondoléba, A.-P. (2020a). Crise des politiques publiques et désaffection à l’égard des élites politiques dans la ville de Ndikinimeki : plaidoyer pour retour à la politique de présence et de proximité. Dans P. Batibonak (dir.), Développer et relooker Ndikinimeki. Quand vient l’heure du décollage (pp. 117-130). Monange.
Loumou Mondoléba, A.-P. (2020b). Jeunes, chômage, frustrations et extrémisme violent en Afrique. Dans Actes du colloque international « Extrémismes, guerres, paix et développement en Afrique depuis les indépendances » (pp. 27-39). Université protestante d’Afrique centrale.
Machikou, N. (2024). Un monde abîmé comme occasion épistémique : quel engagement pour le chercheur dans la cité. Sociologies. http://journals.openedition.org/sociologies/23592.
McAdam, D., Tarrow, S., & Tilly C. (2001). Dynamics of Contention. Cambridge University Press.
Mbembe, A. (1996). La naissance du maquis dans le Sud-Cameroun (1920-1960) : histoire des usages de la raison en colonie. Karthala.
Mbembe, A. (2006). Nécropolitique. Raisons politiques, 21, 29-60. https://doi.org/10.3917/rai.021.0029
Mbembe, A. (2016). Politiques de l’inimitié. La Découverte.
Mbembe, A. (2020a). De la postcolonie : essai sur l’imagination politique dans l’Afrique contemporaine. Karthala.
Mbembe, A. (2020b). Brutalisme. La Découverte.
Mokam, D. (2012). Les associations estudiantines face aux stratégies étatiques d’approvisionnement de la jeunesse universitaire, 1961-2005. Les Cahiers d’histoire et d’archéologie, 12, 281-294.
Morillas, C. (2015). Individualisation versus démocratisation ? Conditions et formes du militantisme étudiant en situation autoritaire (Cameroun, 1962-2014) [Thèse de doctorat, Sciences Po Bordeaux].
Morillas, C. (2018). Domination et résistance étudiante au sein d’un « lieu clos et apolitique » : l’université camerounaise (1962-2014). L’Espace politique, 35(2), 36-59.
Ouambo Ouambo, J. P. (2020). La participation politique des jeunes à la vie publique au Cameroun. Nkafu Policy Institute. https://nkafu.org/wp-content/uploads/2020/06/Participations-des-jeunes.pdf
Owona Nguini, M. É. (2004). Le gouvernement perpétuel en Afrique centrale : le temps politique présidentialiste entre autoritarisme et parlementarisme dans la Cemac. Enjeux, 19, 9-14.
Owona Nguini, M. É., & Menthong, H.-L. (2018). « Gouvernement perpétuel » et démocratisation janusienne au Cameroun (1990-2018). Politique africaine, 150(2), 97-114.
Programme des Nations unies pour le développement. (2017). Vers l’extrémisme en Afrique : facteurs, motivations et éléments déclencheurs du recrutement. Bureau régional pour l’Afrique.
Polet, F. (2016). Entre révoltes populaires et restaurations autoritaires. https://www.academia.edu/34620505/Entre_r%C3%A9voltes_populaires_et_restaurations_autoritaires (consulté le 13 juin 2024)
Pommerolle, M.-E. (2007). Routines autoritaires et innovations militantes : le cas d’un mouvement étudiant au Cameroun. Politique africaine, 108, 155-172.
Pommerolle, M.-E. (2008). La démobilisation collective au Cameroun : Entre régime postautoritaire et militantisme extraverti. Critique internationale, 40, 73-94.
Sindjoun, L. (2003). Ce qu’être opposant veut dire : l’économie des échanges politiques. Dans L. Sindjoun (dir.), Comment peut-on être opposant au Cameroun ? Politique parlementaire et politique autoritaire. Codesria.
Sourna Loumtouang, E. (2015, 26-27 février). Chômage des jeunes et stabilité sociopolitique au Cameroun de 1990 à nos jours. Communication présentée à la conférence internationale sur « le chômage des jeunes en Afrique », Harare, Zimbabwe.
Talla, J.-B. (2014). L’opposition face aux défis de l’alternance. Dans F. Eboussi Boulaga et al. (dir.), Repenser et reconstruire l’opposition camerounaise : questions sur la quête de sens et la subjectivation politique (pp. 27-52). Terroirs.
Zélao, A. (2003). Démocratisation passive et gouvernance politique dans les États de l’Afrique centrale. Revue internationale des sciences humaines et sociales, 5(5), 97-130.
Zélao, A. (2005). Les élections en territoire post-monolithique : la transfiguration du champ politique camerounais au détour du renouveau démocratique. Revue camerounaise de sociologie et anthropologie, 2(1), 97-130.
Pour citer l'article :
APA
Assiene Bissossoli, P. H., & Loumou Mondoleba, A.-P. (2025). Ce que « vouloir voir ses enfants grandir » veut dire pour les jeunes investis dans le champ politique camerounais post-autoritaire. Global Africa, (11), pp. 194–214. https://doi.org/10.57832/w7fy-8p09
MLA
Assiene Bissossoli, Prisca Hélène, and Alain-Patrick Loumou Mondoleba. "Ce que « vouloir voir ses enfants grandir » veut dire pour les jeunes investis dans le champ politique camerounais post-autoritaire." Global Africa, no. 11, 2025, pp. 194-214. doi.org/10.57832/w7fy-8p09
DOI
https://doi.org/10.57832/w7fy-8p09
© 2025 by author(s). This work is openly licensed via CC BY-NC 4.0





